Bonjour Frédéric Lacroix,
J’ai lu avec un grand intérêt le manuscrit de votre dernier ouvrage, que vous m’aviez envoyé.
Il est heureux que vous ayez accepté de faire ce travail, de mener ces recherches jusqu’à leur publication. Il en résulte un ouvrage à la fois engagé et savant. Il est engagé par les dénonciations que vous faites des législations et des décisions passées et présentes, qui fragilisent le statut du français au Québec, et annoncent un avenir encore plus inquiétant. Votre ouvrage est savant par sa rigueur intellectuelle et le soin que vous avez pris dans la recherche des données et dans leur présentation.
Vous avez apporté une contribution percutante au débat actuel, dont il faudra tenir compte dans les décisions à venir. C’est en tout cas ce que j’espère, touchant l’extension de la Loi 101 au cegep et les politiques d’immigration, à tout le moins. Ce gouvernement en aura-t-il le courage?
Je profite de l’occasion pour vous dite quelques mots de la Commission Parent. Ayant été alertés par des mémoires et certaines conversations sur l’anglicisation des enfants des immigrants, deux ou peut-être trois membres de la Commission proposèrent que, dans notre Rapport, nous recommandions au gouvernement de légiférer pour imposer l’école française aux enfants d’immigrants. Mais la majorité des commissaires s’y opposèrent fortement. Ce fut l’objet d’un vif débat au sein de la Commission. Mais il fut accepté finalement qu’au moins nous en parlerions. D’où les huit pages du Rapport qui en traitent (chapitre III,, section IV), le compromis entre nous étant de compter sur ce que vous appelez la «concurrence». Nous avions obtenu subrepticement les données de la CECM, qui prétendait ne pas en avoir, comme le prétendait la Commission scolaire protestante, sur les origines ethniques des élèves. Cela nous permit de présenter le Tableau V, que nous trouvions convainquant et inquiétant.
Mais ces huit pages, que nous croyions de la dynamite, n’ont attiré l’attention d’à peu près personne à l’époque. Nous étions pourtant à la veille de la crise de St-Léonard.
J’espère que vous allez bien et que vous continuez vos travaux de recherche.
Très cordialement
Guy Rocher