Le Canada importe des chômeurs

Statistique Canada publie mensuellement une « Enquête sur la population active » où un suivi longitudinal de variables reliées à l’activité économique, telles que le taux de chômage et d’emploi, est effectué.

Les données du mois d’avril 2025 ont été rendues disponibles le 9 mai. L’on y apprend que le taux de chômage au Canada a continué à augmenter, s’établissant à 6,9% en avril 2025 (+1,8 points depuis 2 ans) et que le taux d’emploi a continué à diminuer, atteignant 60,8% (-1,7 point en 2 ans). La hausse du taux de chômage est particulièrement rapide chez les jeunes de 15 à 24 ans où il atteint maintenant 14,1%, en nette rupture avec la moyenne pré-COVID19 de 10,8%.

Si le taux de chômage est un concept bien connu, le taux d’emploi l’est moins. Ce dernier est particulièrement intéressant car il correspond à la fraction de la population occupant un emploi et, contrairement au chômage, il se calcule en incluant à la fois les personnes actives et inactives (qui ne sont pas à la recherche d’un emploi) au dénominateur. Le taux d’emploi permet donc de suivre l’évolution réelle de la contribution de la population à l’économie.

Statistique Canada note que « Le taux d’emploi a suivi une tendance à la baisse pendant la majeure partie de 2023 et de 2024, la croissance de la population ayant dépassé la croissance de l’emploi ». Il semble que le Canada, avec l’une des politiques d’immigration de masse les plus débridées au monde, rajoute depuis plusieurs années, avec l’immigration, de l’aveu même de Statistique Canada, quantité de chômeurs et d’inactifs à sa population active.

Importer des chômeurs et des inactifs

Voyons l’évolution des choses sur la période d’avril 2023 à avril 2025. Le bloc principal qui forme la population active, celui des 15-54 ans, a augmenté de 1 642 500 personnes durant cette période 24 mois, soit une croissance de 8,2% depuis avril 2023. Une croissance, soulignons-le, absolument phénoménale, record, démentielle. Pour comprendre un peu ce que cela signifie, à ce taux de croissance, la population des 15-54 ans aura doublé au Canada dans 17 ans, pour atteindre 40,5 millions à elle seule en 2042, soit l’équivalent de la population actuelle totale du Canada.

Durant cette même période 2023-2025, le nombre d’emplois au Canada a augmenté de 711 500, une croissance de 3,5%. La croissance de la population inactive ou au chômage dépasse donc de 931 000 personnes celle des emplois!

Dans les deux dernières années, le Canada a connu un solde migratoire total frisant les 2 millions de personnes, en incluant les autres groupes d’âge (les 0-14 ans et les 55 ans et plus). La hausse de la population active de 15-54 ans est due presque entièrement à l’immigration. Le Canada a donc fait venir presque un million de personnes de trop -relativement au nombre d’emplois créés – personnes qui sont allées gonfler les rangs des inactifs ou de ceux au chômage parmi la population des 15-54 ans. Et c’est sans compter les 0-14 ans qui s’ajoutent sur les bancs d’école, ainsi qu’un nombre non négligeable d’immigrants de 55 ans et plus, qui s’ajoutent ou s’ajouteront bientôt aux rangs des retraités sans jamais avoir contribué de façon significative aux caisses de retraite.

Même dans les groupes d’âge d’immigrants qui sont supposés venir tonifier les rangs des travailleurs, pour compenser les départs à la retraite nous dit-on, l’on constate depuis 2 ans une baisse généralisée des taux d’emploi selon la classe d’âge et le statut migratoire (tableau 1). Cette baisse du taux d’emploi n’épargne personne mais touche particulièrement sévèrement les 15-24 ans qui subissent une érosion de leur taux d’emploi de 8,4 % (pour ceux nés au Canada) à 13,2 % (pour les immigrants depuis 10 ans et plus).

Tableau 1 : Taux d’emploi en fonction de la classe d’âge et du statut migratoire sur la période 2023-2025

Statut migratoireAvril 2023Avril 2025Différence (%)
15-24 ans
Nés au Canada57,252,4-8,4
Immigrants depuis 5 ans et moins51,546,1-10,5
Immigrants depuis 10 ans et plus55,548,2-13,2
25-54 ans
Nés au Canada85,785,0-0,8
Immigrants depuis 5 ans et moins77,276,7-0,6
Immigrants depuis 10 ans et plus84,982,3-3,1

Notons aussi, au tableau 1, que le taux d’emploi des immigrants, même des immigrants présents depuis 10 ans ou plus, est systématiquement inférieur à celui des personnes nées au Canada. Cela est un signe que l’intégration économique effective des immigrants prend beaucoup, beaucoup de temps.

L’institut Fraser, dans l’une des seules études sur le sujet jamais faite au Canada, avait estimé en 2013 que l’immigration imposait, précisément à cause des taux d’emploi et des revenus généralement inférieurs des immigrants, un fardeau fiscal d’environ 20 milliards de dollars par année au Canada. Comme le Canada admettait à l’époque environ quatre fois moins d’immigrants par année comparativement à aujourd’hui, il faudrait multiplier ce montant par un facteur d’au moins quatre, ce qui signifie que les charges sociales reliées à l’immigration équivalent à environ 18% des dépenses annuelles courantes du gouvernement canadien.

Le fiasco économique de l’immigration de masse

Ces données expliquent en partie la stagnation du produit intérieur brut (PIB) par habitant que l’on constate au Canada depuis une dizaine d’années; on dilue la valeur des biens et services produits en gonflant, via une immigration excessive, le nombre d’inactifs et de chômeurs plus rapidement que le PIB n’augmente. C’est une illustration du « piège démographique » évoqué par l’économiste Stéfane Marion de la Banque Nationale, piège causée par une politique d’immigration totalement déconnectée de l’économie réelle.

Non seulement la politique d’immigration canadienne mené depuis la prise de pouvoir du Parti libéral du Canada en 2015 ne nous « enrichit » pas comme il est très souvent affirmé, elle nous appauvrit. Et pas qu’un peu.

Ce qui force la question fondamentale : quel est l’objectif réel de la politique d’immigration du Canada?

Cet objectif n’est clairement pas de nature économique.